Je ne voudrais clore cette page consacrée en grande partie à Jean- Michel Charlier,
Victor Hubinon et Buck Danny sans oublier Felix Mollinari et son personnage Garry.
Pourquoi eux ? Simplement parce que le hasard m'a fait croiser leur route à un âge me permettant de les apprécier. C'aurait pu être celle de n'importe quelle autre de ces bandes dessinées foisonnant à l'époque, bandes dessinées de série B, vendues essentiellement en kiosques ou dans les librairies de gares. Mal imprimées sur un triste papier, s'abîmant presque aussi vite que lues, leur durée de vie excédait rarement une ou deux lectures. Elles étaient réalisées par des auteurs qui n'avaient, le plus souvent, d'autre ambition que celle d'honnêtes artisans. Mal payés, ils abattaient les pages en stakhanovistes avec une conscience professionnelle remarquable et firent rêver des milliers de gosses. Chaque dessinateur de mon âge port l'une ou l'autre de ces séries traînant au fond de son cœur. Je sais à Conrad un attachement tout particulier pour Pepito. Tout cela avait un petit côté manga avant la lettre. A cette différence que quelques auteurs asiatiques sont révérés chez eux à l'instar de demis-dieux, tandis qu'eux…
Je glisserai également un mot sur mon affection pour Matt. J'espère, à travers ces deux auteurs, rendre un petit hommage à tous ces dessinateurs et scénaristes auxquels la postérité ne laisse que trop souvent le choix entre doux mépris et total oubli.
 
Garry est l'archétype de la bande dessinée de guerre ne se posant pas trop de questions. Elle n'est finalement, avec un talent moins affirmé et un éditeur moins confirmé, pas tellement différente des Buck Danny de la première époque. Je l'ai rencontrée début des années soixante, lors de vacances en Belgique. Je passais la soirée chez un oncle, frère de mon père. Son fils, nettement plus âgé que moi, était sur le point de se marier. Il me fit cadeau d'un paquet de romans de son enfance et de quelques Garry dont il voulait se débarrasser. J'ai eu la chance de tomber sur la meilleure époque de la série.
Le dessin avait un petit quelque chose de Milton Caniff avec un bel emploi du noir et blanc et les scénarii une certaine assise historique. J'ai pris à leur lecture beaucoup de plaisir, y retrouvant mes chères " Faces de citrons " mais j'avoue avoir été en manque de la présence de la douce Susan.
 
Pour Matt, c'est tout autre chose. J'étais de nouveau en vacances en Belgique, où j'ai fait une grande partie de mes découvertes, quelques années plus tôt, en 1957. Nous étions en visite chez des amis de mes parents qui avaient un fils, du même âge que moi. Tout se passait bien jusqu'au moment où ce dernier dut aller se coucher. Seul, je traînais mon ennui lorsque je mis la main sur une petite revue, moitié couleurs, moitié noir et blanc. Oscar le canard au pays des Maharadjahs. C'était une revue pour fillettes mais je ne m'en offusquais pas. Un petit canard, sa jeune maîtresse et sa vieille grosse tante Zulma étaient plongés dans ces fabuleuses Indes de Ruyard Kipling,,chasses aux tigres, cortèges d'éléphants sacrés, turbans couverts de pierres précieuses, rien ne manquait à la panoplie. Elle était neuve pour moi. C'est le souvenir le plus marquant de cette soirée.
Adulte, j'ai retrouvé quelques Garry et Oscar le canard. Les dessins ne sont pas mal fichus, tant pour l'un que pour l'autre. Beaucoup de vie, d'honnêteté, de candeur…
Du vrai art populaire pour enfants, dans toute sa fraîcheur.
Merci, messieurs.
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